Est-ce qu’un tel programme va donner envie d’aller au cirque ?
C’est la question que l’on peut se poser après avoir vu hier soir, le programme A, proposé dans le cadre de la 46ème édition du Festival Mondial du Cirque de Demain.
En effet pourquoi payer une place quand on peut voir gracieusement dans la rue un tel spectacle ?
De plus, le visuel utilisé cette année n’est guère motivant, on y voit une tête emprisonnée dans des anneaux de jonglage, semblant indiquer que le cirque de Demain sera un cirque bâillonné.
Bref il faut aujourd’hui être, plus que motiver pour aller voir une telle production qui semble bien petite tant par le nombre que par la qualité de numéros présentés.
En 2024, pas de numéro d’ouverture, malgré ce qui est indiqué dans le programme. De pls le spectacle A n’est composé que de 10 prestations au lieu des 11 numéros habituellement proposés les années précédentes.
Et cet affaiblissement se situe à tous les niveaux !
Ainsi, l’orchestre ne sert plus à grand-chose, hormis au début de chaque partie; et pour reconduire les artistes. La formation musicale conduite par le Maestro Morel (voir blogs 08/02/2019 & 15/02/2023), que ”le monde entier nous envie”, dixit le facétieux Calixte de Nigremont (voirblog25/01/2014), vaut mieux que cela. A la place nous avons eu droit à de la musique en conserve, poussée généralement à fond, empêchant ainsi aux artistes de communiquer avec le public, un des moments indissociables du cirque, mais bien dans l'air du temps avec l'usage à tout va du portable aujourd'hui dans nos vies.
Mais au fait qu’est-ce que le Cirque ?
Alain Pacherie(voir blog17/04/2013) y répond dans son éditorial en page 3 du programme. Le cirque indique-t-il ce sont ”des artistes venus de tous les pays du monde, capables de réaliser d’incroyables prouesses, des performances que l’on peut ne voir nulle part ailleurs.”
J’applaudis à deux mains cette définition, mais bon nombre de numéros vus hier ont plus leur place dans un Festival de Théâtre de rue comme celui d’Aurillac que sur la scène du Phénix.
Si le numéro présenté par Matéo Turbelin et Aélia Savary, regorge de créativité, c’est essentiellement de la danse. Le diabolo n’est plus qu’un simple complément à la chorégraphie. Il en est de même pour ce le Trio Inshi a proposé. Sur une musique signée Camille Saint-Saëns, le jonglage avec des balles n’est qu’un élément parmi d’autres de ce ballet masculin, au demeurant bien exécuté avec des costumes recherchés.
Et que dire du rola géant né de l’imagination créative des membres du collectif The Revel Puck ! Notons que cette Compagnie ne respecte plus les codes de la piste qui veulent que si on rate un trick, on le recommence. Sur les 5 équilibres présentés, deux n’ont pas aboutis. Nous sommes en plein Théâtre de rues, où l’intention prime toujours sur le résultat.
La plupart des numéros présentés hier se focalisent sur l’exploit brut en oubliant la grâce et la convivialité. Ainsi le numéro d’ouverture met mal à l’aise. Albert Amores a décidé de montrer un numéro de Pôle Artavec les jambes en position du yogi. Cela donne à sa prestation la sensation que nous avons devant nous, un artiste handicapé aux jambes sectionnées. On est loin de l’embellissement prôné dans son édito par le patron du Cirque Phénix.
Mais de tout ce fatras de théâtre de rue, deux numéros émergent, celui de la Troupe Nationale de Chine présentant un numéro de jonglerie avec rebond à huit mains, avec il faut le souligner un côté un peu trop robotique. Mais mon coup de cœur revient à l’artiste tadjik Mukhamadi Sharifzoda, déjà vu à Gérone en 2019 qui depuis a revisité avec maestria et bonheur les équilibres sur mains en remplaçant les cannes par un podium constitué d'éléments en bois non fixes, sur lequel il propose des poses plastiques et des sauts avec changements de bras. Un beau numéro qui sera on n'en doute pas récompensé.
Que me réserve le programme B, je vous le dirais demain, mais d’ici là portez-vous bien !