Déraisonnable, à la limite du bon sens, tels sont les sens du nom extravagant, titre du spectacle proposé depuis octobre dernier (voir blog09/09/2022), par le cirque Arlette Gruss. Alors voit-on un spectacle insensé ? Assurément non, rien de déraisonnable dans cette production, les numéros avec animaux (chevaux et lamas) sont à peine présents. Il ne faut pas faire preuve d’extravagance avec les Mairies de Paris et des grandes villes, véritables censeurs des productions circassiennes en France . En effet si on ne respecte pas leurs désidératas, on est interdit dans la ville . Ce n’est pas plus compliqué que cela. Et comme ce sont dans les grandes métropoles où les spectateurs sont les plus nombreux, l’économique prend vite le pas sur la liberté artistique. Depuis quelques temps on constate que les spectacles circassiens proposés s’appauvrissent. En effet à force de supprimer les éléphants, les fauves, les clowns, et que sais-je encore, on remplace ces numéros par du chant et des ballets qui donnent à la piste contemporaine un côté de plus en plus music-hall, voir cabaret. Ces numaros musicaux il faut le dire, le chant et la danse coûtent beaucoup moins que les repas journaliers des pachydermes et des équidés. Alors pourquoi s'en priver...
Mais revenons au spectacle, dont le visuel nous montre un Kevin Sagau (voir blog26/09/2021) tel un papillon sortant sa chrysalide dans une tenue baroque et délirante. C’est me semble-t-il dans les somptueux costumes créés par Roberto Rosello (voir blog24/06/2016) qu’il faut recherche le côté extravagant de cette production.
Commençons par les numéros estampillés Gruss. En peu de temps Alexis et Eros ont pris une épaisseur artistique à faire pâlir certains vieux briscards. Leurs jeux icariens sont une merveille de dynamisme et de technicité, et lors du numéro final (banquine et planche coréenne) ils montrent que bon sang ne serait mentir. Assurément de futurs grands de la piste. Le grand frère Kevin et son épouse Julia nous proposent aussi avec sureté et audace un grand moment aux sangles aériennes. Par contre la cavalerie n’est pas à la hauteur du nom de Gruss. On se met à regretter le temps où c’était Lucien Gruss qui officiait et qui donnait un autre relief à cette partie incontournable d’un spectacle de cirque.
Par contre on a revu avec intérêt le fildefériste Geoffrey Berthault, déjà vu en 2014 lors du Festival Mondial du Cirque, présentant sur deux fils perpendiculaires, l’un à 1,75m l’autre à 90 cm du sol un travail où alterne souplesse et équilibre. Il nous gratifie notamment de deux sauts périlleux, un arrière et l’autre avant, de toute beauté. Son épouse Désirée Cardinali-Chaves présente des beaux équilibres et des contorsions sur mains. Le Duo Lyd, toujours parfait nous montre cette année, au cadre aérien, toute l’étendu de leur immense talent. Quant à la jeune hongroise Anna Demeter elle manie la corde souple avec aissance et nous montre une rattrape aux jarrets de belle facture. Deux numéros collectifs, de jonglage et de banquine complètent cet éléant spectacle. Quant à Kevin Sagaud, cette année il est mi M. Loyal, mi chanteur montrant toujours une belle prestance. Enfin Bellini (voir blog21/04/2016) et André (voir blog11/11/2015), en renouvelant la plupart de leurs entrées, nous montrent qu’ils ne sont jamais à court d’idées comiques.
Comme chaque année, l’orchestre dirigé par Igor Nita, habille avec bonheur musicalement ce spectacle. Et on reste toujours impressionné par la vision totale que ce nouveau chapiteau procure, ainsi que par les 150 spots lumineux nous offrant des tableaux lumineux donnant aux productions Gilbert Gruss un côté show international.
Extravagant, une production à classer dans les bons crus Gruss.