L’éléphant est l’animal emblématique du cirque. Et dès le XIX° siècle, le nombre de pachydermes dans une ménagerie permettait de jauger l’importance de l’établissement. Ces animaux fort coûteux à l’achat et à l’entretien et seuls les établissements prospères pouvaient en acquérir. Ainsi un seul éléphant consomme environ 200 kg de paille et de foin et boit 200 l d’eau et sans parler des petites gâteries que représentent les fruits et tubercules ou des frais médicaux quand l'animal est malade.
Avant ou après la seconde guerre mondiale les cirques français tels Pinder, Bouglione, Amar pour ne citer qu’eux, rivalisaient autour de la publicité faite autour de ces animaux. Les affiches, les programmes, les prospectus vantaient le nombre respectif de ces gros mastodontes dans leur établissement. Amar revendiquait le troupeau le plus important d’Europe, et possédait à un moment 16 pachydermes. Une affiche de ce cirque montrait Zambo, le seul éléphant au monde qui tourne en équilibre sur une patte. Pinder de son côté utilisait beaucoup les tours de ville pour sa publicité, et mettait ainsi en valeur les 10 éléphants géants qui dans une marche triomphale (dixit la pub) avait le mérite de marquer les esprits des citadins. Quant à Bouglione surfant sur le succès de la pantomime "La Perle du Bengale" (voir blog03/09/2011) l’éléphant était une sorte de mascotte maison. Et même lors du dernier spectacle nommé "Géant" (voir blog09/12/2014) au cirque d’hiver Bouglione l’affiche créée par Melki (voir blog26/11/2010), a retenu l’animal à la longue trompe comme accroche pour la communication visuel de ce cirque parisien. Les éléphants grandes vedettes populaires restent de nos jours les animaux favoris du public. Il en est de même des enfants généralement fascinés par ce gros animal aux oreilles démesurées.
Or, quelque ne fut pas notre surprise d’apprendre que le groupe américain "Feld Entertainment", propriétaire de plusieurs cirques, avait décidé de retirer les éléphants de ses cirques itinérants. Et même si cette décision n'a pas été facile à prendre, selon les dires de Kenneth Feld, le PDG de Feld Entertainment, elle est selon lui dans l’intérêt à la fois de l’entreprise, des éléphants et des spectateurs. Et les 13 éléphants qui voyagent actuellement avec les trois cirques de Ringling Bros. vont être mis, d'ici 2018 à la retraite en Floride au Centre pour la conservation des éléphants, où ils rejoindront les autres éléphants que possède Ringling Bros. dans ce centre de conservation. "Le monde du cirque évolue ont indiqué Nicole et Alana Feld, respectivement productrice et vice-présidente de "Feld Entertainment" et avec cette décision nous allons pouvoir continuer à mettre l'accent sur la protection des éléphants tout en permettant à nos cirques de continuer à satisfaire les goûts des spectateurs, qui ont évolué".
Mais on peut se demander aussi si la décision annoncée jeudi dernier n’est pas basée aussi sur le fait que plusieurs grandes villes américaines ont ces dernières années adopté des ordonnances "anti-éléphants" empêchant les cirques de se produire dans ces villes. D’ailleurs dans son communiqué, Feld Entertainment insiste sur sa volonté de se placer en pointe dans le domaine de la sauvegarde des éléphants d'Asie, notamment grâce à son centre créé en 1995 en Floride. Et n’oublions pas ce qui peut aussi expliquer cette mesure, c’est qu’en 2011 les cirques Ringling Brothers avaient accepté de s'acquitter d'une amende de 270 000 $ pour mettre fin à des poursuites engagées contre lui en raison de violations de la législation sur la protection des animaux. En effet les autorités américaines accusaient "Feld Entertainment" de mauvais traitements envers les animaux, notamment les éléphants, sur la période allant de 2007 à 2011, pendant laquelle elles ont à plusieurs reprises inspecté les installations où le cirque loge ses animaux. Le groupe avait démenti toute maltraitance.
Alors cette mesure est-elle due aux mesures réglementaires, ou est-ce une parade pour se refaire une virginité concernant l’accueil des animaux ? A vous de juger mais vu le coût d’entretien des pachydermes, "Feld Entertainment" va faire de sérieuses économies.