Si Toulouse-Lautrec (voir blog17/03/2011) adorait dessiner les filles des bordels, il aimait aussi peindre celles de la piste aux étoiles. Nous avons déjà évoqué lors de précédents bloc-notes, certaines de ses œuvres circassiennes comme "La clownesse Cha-U-Kao" (voir blog28/12/2015), "L’écuyère du cirque Fernando" (voir blog03/01/2016), ou son livre "Le Cirque" dans lequel on trouve les trente-neuf dessins au crayon noir et aux crayons de couleur sur le monde de la piste (voir blog03/01/2016).
L’exposition qui se tient en ce moment à Paris sur ce peintre albigeois, ne cache nullement son penchant circophile et nous présente de nombreuses œuvres circassiennes dont beaucoup ne nous sont pas inconnues. Par contre un dessin se trouvant habituellement aux U.S.A. au "Philadelphia Museum of Art", œuvre nommée un peu énigmatiquement : "Au Cirque Nouveau, La Clownesse aux cinq plastrons" est une découverte.
Ce tableau réalisé en 1892 (138,1 × 105,1 × 8,3 cm) sur papier vélin avec un assemblage de fusain, gouache, aquarelle et huile, représente de dos une femme rousse au chignon parfait, portant un petit chapeau. Assise sur un siège au bord de la piste du Nouveau Cirque (voir blog06/12/2010), la spectatrice (mondaine ou cocotte ?) tient dans sa main droite des jumelles et semble absorbée par le spectacle qui se joue devant elle. De l’autre côté de la piste, 5 gandins dont on aperçoit la blancheur du plastron regardent cette élégante parisienne venue assister à la revue japonaise "Papa Chrysanthemum" Une évocation d’un prince nippon jouée sur la piste transformée en mare, recouverte de lotus et de nénuphars et où, une artiste (danseuse ou contorsionniste ?) se cambre fortement en arrière.
Ce dessin était dans la réalité un carton pour un vitrail (120x85), qui sera créé en 1895 par l'artiste designer américain Louis Comfort Tiffany pour la galerie "L'Art Nouveau" du marchand Siegfried Bing. Réalisé en verres jaspés, imprimé doublé, colorés, rehaussés de cabochons et plomb, ce vitrail est aujourd'hui exposé à Paris au musée d'Orsay.
Et pour cette exposition sont exposés exceptionnellement l’un à côté de l’autre, le tableau de Toulouse-Lautrec et le vitrail de Louis Comfort Tiffany. Cela permet notamment de constater un petit détail entre les deux œuvres, le vitrail montre bien les cinq hommes endimanchés, tandis que dans le dessin on n'en distingue clairement que quatre, le cinquième n'étant visible que par la blancheur de son plastron.
Au cours de cette exposition on trouve aussi quelques dessins de Toulouse-Lautrec représentant Louis Fernando, Chocolat (voir blog11/02/2012), de Footit (voir blog06/02/2016) ou de La Goulue (20/02/2013). Il faut dire, comme aimait le dire l'écrivain Gustave Coquiot : "Footit, Chocolat et Lautrec étaient des clients tenaces du bar Achille, où ils dégustaient tous trois tous les short-drinks, tous les gins-wiskies, tous les gobbers et punchs de la maison."
Quant à Lautrec, il aimait toujours selon Coquiot: le " cirque populaire, le cirque du vrai peuple, sensible à la force, à l'adresse ... le véritable cirque où tout est pailleté, en oripeaux, en franges fanées d'or ou d"argent, où tout est clinquant, bariolé et vif!"
Toulouse-Lautrec le peintre circophile, en représentation en ce moment au Grand-Palais de Paris jusqu'au 27 janvier 2020.