Le Cirque sous l’eau, 2 versions d’un même spectacle racontées par Jérôme Medrano
Le monde du spectacle en général et du cirque en particulier a bien souvent été celui des superlatifs les plus ronflants. Mais il est toujours plaisant de voir comment un même
événement peut être relaté différemment surtout s'ils sont racontés avec quelques années de distance. Comme quoi l’authenticité d’une information n’est pas toujours la même selon les époques.
Pour illustrer notre propos prenons à témoin "Le Cirque sous l’eau" spectacle qui a eu lieu en novembre 1932 au Cirque de Medrano de Montmartre, établissement qui à cette époque était dirigé par
le fils de Boom-Boom : Jérôme Medrano (voir blog16/10/11).
Pour contrecarrer Gaston Desprez, le directeur du Cirque d’hiver qui lui avait piqué Les Fratellini, et qui souhaitait présenter "Les Nuits du Califat", pantomime
nautique (voir blog01/09/11), Jérome Médrano, ayant appris par une indiscrétion ce projet, s’empressa de mettre sur pied en quelques semaines un spectacle similaire: "Le cirque sous l’eau". Et ce
qui est savoureux c’est de comparer entre ce qui est écrit dans "Medrano Magazine" et le récit qu’en donne cinquante ans plus tard Jérôme Medrano, dans son livre: "Une vie de
Cirque".
La brochure indique que monter une pantomime nautique était depuis très longtemps le vœu le plus cher de la direction et, après de longues recherches et de
lointains voyages à travers l’Europe, le cirque avait pu acquérir l’un des matériels les plus perfectionnés comprenant: quatre immenses
réservoirs, une chaudière pour porter à une température agréable l’énorme quantité d’eau (250 000 litres), de puissantes pompes, des fontaines lumineuses, un pont, un bateau, une
ile...
Toute autre est la version qu’en donne Jérôme Medrano dans son livre. Pour réaliser rapidement une pantomime nautique pas question de faire fabriquer un tel matériel, nous sommes
en octobre et le spectacle doit être présenté un mois plus tard, il faut donc acheter l’un des deux matériels disponibles. Desprez ayant retenu celui du Cirque Bush, il ne reste que celui du
Cirque du Capitaine Schneider qui vient justement de déposer son bilan et qui est donc en vente. Un fois acheté ce matériel, des plus perfectionnés, se révèle être dans un état déplorable. Le
tapis de caoutchouc présente des déchirures de plus d’un mètre, la pompe principale est hors d’usage, tous les joints sont à refaire, le bac en tôle
qui permet l’effet de cascade est inutilisable et l’étanchéité est pour le moins aléatoire enfin, il est impossible d’évacuer la totalité de l’eau, tant la pompe semble obsolète. Il faut donc
faire appel aux Sapeurs Pompiers pour évacuer la totalité de l’eau… Enfin avec la fameuse chaudière qui devait mettre l’eau à une température agréable on frôla le désastre, car les malheureux
artistes sortaient de l’eau soit bleus de froid soit rouges comme des écrevisses selon que l’eau était glacée ou bouillante…
Mais ce qui est réjouissant à la lecture de ce livre, c’est de voir la force de caractère de Jérôme Medrano qui devant l’adversité ne baissa jamais les bras, un
bel exemple à méditer, car à vaincre sans péril on triomphe sans gloire!
(Photo de Jérôme Medrano by PJ Dannes)