Emile Recordier conserve à ce jour une place à part dans le panthéon du cirque, une place qui n’appartient qu’à lui et à son talent. Ni clown, ni M. Loyal, ni régisseur, ni pitre cet ancien acteur et journaliste était un personnage tout à fait original et nouveau dans la fantastique galerie des amuseurs de la piste, c’était un faire-valoir que l’on vit principalement sur la scène de l’Empire (voir blog10/05/2013) mais surtout au Cirque Médrano (voir blog07/04/2011). Il eut pour partenaires Mylos, Boulicot (voir blog08/01/2012) et Loriot. Surnommé P’tit Mimile par Boulicot son complice préféré Recordier se présentait sous l’aspect bonhomme et légèrement bedonnant d’un officiel de l’établissement, avec gants blancs, boutons d’or à profusion sur les manches et les bandes noires de son pantalon de cérémonie. Et sous cette distinction d’apparat se cachait un bonimenteur hors norme usant calembredaines troussées, plaisanteries faciles et énormes calembours dans le plus pur style des farceurs qui à cette époque plaisait à un public bon enfant et, bien décidé à s’amuser. Recordier créa la fonction de Faire-Valoir dans un nouveau genre que l’on a nommé le tour des blagues, dont certaines sont restées dans la mémoire populaire. Pourtant P’tit Mimile n’était pas un bavard invétéré en quête d’un bon mot à placer. Il était l’auteur de tous les sketchs joués sur la piste, ainsi ou plutôt surtout de trois pantomimes (voir blog01/09/2011), sortes de farces clownesques qui furent et resteront des événements dans l’histoire du cirque en général et du cirque Medrano en particulier, et qui ont pour nom : "Rhum à Rome" (1936), "On a enlevé la femme à barbe" (1938) et "Le fils de Buffalo Bill" (1939).
Alors pour la bonne bouche et pour se faire plaisir un micro-sketch signé Recordier, avec comme compère son fidèle Boulicot :
-“Dites-moi Boulicot… Savez-vous comment l’on appelle un homme qui en tue un autre ?
-Un médecin !
-Non, Boulicot… celui qui tue un autre homme est un homicide.
-Tiens, tiens, tiens…
-Et celui qui tu son frère ?
-Un, un, un… je l’ai sur le bout de la langue… un fils unique !
-Je vais vous le dire Boulicot, un fratricide. Et une belle-mère qui tue son gendre ?